Profilage criminel : tentative N°2 (1)

Après avoir fait des miennes avec l’affaire de Lille il y a 4 mois de cela – et très vraisemblablement m’être trompé en suivant la piste d’un tueur en série suite aux amalgames de la presse (qui persistent d’ailleurs : Plongées mortelles – Libération, merci à Camille pour l’info !), mais tout en ayant vu juste pour la découverte du dernier corps (Cf : « Profilage criminel : une tentative 1 à 4 » que vous retrouverez en cliquant sur la catégorie Criminologie à droite de cette page), voilà que je remets ça.

Depuis le début de l’année, différents crimes ont fait la une des médias : Lille donc, l’affaire « L » un peu plus tôt à Pornic, et plus récemment « J-M » en Ardèche. J’évoquerai peut-être celle-ci dans les jours qui viennent, mais il est fort probable que le ou les coupable(s) soient appréhendés sous peu compte-tenu des pistes assez limitées. En attendant, et suite aux informations récentes de la journée, je vous propose d’évoquer la disparition de « A », 13 ans 1/2, à Pau. Une fois de plus, les affaires que je mentionne peuvent être très facilement retrouvées sur le net via les différents sites de presse, mais je préfère préserver l’anonymat des personnes impliquées.

Le 4 juin, A a disparu aux alentours de 23h. Plus précisément, il est enregistré par une caméra de surveillance alors qu’il est sur son vélo à 22h51 au niveau de la Poste rue Carnot, à Pau. Sa destination se trouve 200m plus loin à peine, place Samuel de Lestapis. Pour s’y rendre, il croise donc, dans le prolongement de la rue Carnot, la rue Raymond Planté sur sa droite, débouche sur le carrefour place de la République où le plus court voudrait qu’il oblique à gauche. S’il continue tout droit, il croise ensuite la rue Galos où il peut également prendre à gauche. Le quartier est commerçant, à vue d’œil aucun bar ou aucun restaurant ouvert à une heure pareille, même un samedi soir.

Le 26 juin 2011, un morceau de son corps est retrouvé dans une rivière de Pau, rivière qui se situe à 800 mètres environ de l’endroit où il a été vu pour la dernière fois. Selon les informations que j’ai via la presse, la découverte macabre est fait à 1Km-Km200 du lieu de sa disparition. Afin de clarifier un peu plus ces informations, et pour vous éviter de passer par GoogleMaps pour l’instant, je vous propose le plan mis en ligne par Le Parisien (dont je signale au passage la qualité de ses informations – quitte à ce que certains qualifie cela de voyeurisme journalistique) :

La disparition de A est hélas signalée avec 24h de retard. Son vélo est retrouvé assez rapidement le dimanche 5 juin, rue Galos, accroché avec un cadenas qui ne serait pas le sien. La veille, à l’heure où A devait arriver chez son père, un homme ivre à proximité de la rue Galos est l’occasion d’une intervention de la police et du déplacement de quelques locaux. Aucun d’entre eux n’aperçoit un adolescent à vélo. Un habitant de la rue Galos signale que la bicyclette n’aurait pas été placée là avant le dimanche à une heure avancée de la matinée, et dans tous les cas ce vélo aurait dû être entreposé là où habite le père.

Sur l’un des sites d’information, un internaute signale au moins un, si ce n’est peut-être deux cas similaires de disparitions suivies de décès étranges, survenus à la fin des années 1990 : Mars 1998 et Septembre 1998. Loin de moi l’idée de vouloir de nouveau parler de tueur en série pour l’affaire A, mais certaines similitudes méritent peut-être de s’attarder sur ces faits antérieurs.

Mais pour revenir au cas A, nous avons donc les informations suivantes :
– Adolescent de 13 ans 1/2, 1m50, allure « normale »
– Disparition dans la nuit de samedi à dimanche vers 23h
– Vélo peut-être placé le lendemain à proximité du domicile, peut-être avec un anti-vol différent (infos incertaines), aucune trace de choc
– Corps démembré post-mortem, probablement mis à l’eau (lesté ? n’oublions pas que l’affaire « L » de Pornic remonte à janvier-février, et que le Modus Operandi a pu donner des idées à d’autres…, ce qui expliquerait que les parties du corps n’aient pas fait surface dans les 5 jours qui suivent comme le veut la loi des corps) en amont du lieu de découverte, probablement depuis un point situé entre la gare SNCF de Pau et le Parc du Château, le long de l’avenue Jean Biray (qui par bien des aspects rappelle l’une des artères de Lille où une voire deux des victimes étaient tombées à l’eau : peu d’habitations, de nombreuses places de parking (probablement en grande partie désertées la nuit venue), la proximité du cours d’eau, etc.

Place aux déductions :
– L’absence de choc sur le vélo, le soin de la mise en scène (le vélo placé rue Galos en particulier), le démembrement indiquent un acte réfléchi, en aucun cas un coup de panique suite à un accident. Il s’agit définitivement d’un assassinat, réfléchi. Le fait qu’il ait lieu en ville, sur 2 à 3 sites différents (lieu de rencontre et zone de largage, peut-être également un lieu où A a été gardé quelques minutes/heures et découpé) indiquent de façon évidente un tueur à dominante organisé, dont par bien des aspects rappelle le type de SK (= Serial Killer) dit « de confort ».
– L’assassin est un homme qui habite Pau ou dans la proximité immédiate des lieux. Il a probablement un emploi, une certaine stabilité de vie. Il est également fortement probable qu’il soit célibataire et qu’il soit âgé entre 30 et 50 ans.
– Il possède un permis de conduire.
– C’est un homme sûr de lui, audacieux dans son M.O. (= Modus Operandi). Il est probablement sexuellement compétent et en conséquence le meurtre n’est pas un acte palliatif mais plutôt complémentaire. Il a un Q.I. proche de la moyenne, peut-être légèrement supérieur compte tenu du déplacement du corps, du découpage opéré et du cadre urbain (qui fait la différence avec T.M., assassin de L à Pornic, bien moins intelligent).
– La majeure partie de l’agression et du crime (la totalité ?) s’est probablement déroulée en voiture.
– Compte tenu du placement du vélo, il a soit discuté avec sa victime, soit est un familier des lieux, peut-être un voisin. Si en effet l’anti-vol n’est pas celui d’A, il est probable que l’agresseur possède lui-même un vélo (comment trouver un anti-vol un dimanche à Pau sinon ?). Si c’est un voisin, le problème de la conservation du corps se pose : comment A est-il amené à suivre son agresseur et surtout où la découpe a-t-elle lieu ? Une question se pose toutefois : où a exactement lieu l’intervention de la police ? A s’est-il rapproché par curiosité de la rue Galos pour suivre la scène avant de rentrer chez lui, même si personne ne l’a vu ?

Voilà pour un panel des premières impressions. Je penche en tout cas pour une personne habitant à proximité, dans les 300 ou 400m à vol d’oiseau. Le crime est prémédité et réfléchi, il ne s’agit en aucun cas d’une mauvaise rencontre subite mais bien d’un acte mesuré.

Affaire… à suivre

~ par Laurent T sur 1 juillet, 2011.

14 Réponses to “Profilage criminel : tentative N°2 (1)”

  1. Bonjour,
    J’apporte qques précisions: l’antivol lui a été prêté par un copain dans la journée, voilà pourquoi ses parents ne l’ont pas reconnu tout de suite.
    Des imprécisions sur les distances: l’itinéraire sur Mappy Rue Carnot (niveau rue Raymond Planté) – Samuel de Lestapis vous donne la réponse.

  2. Entièrement d’accord Sur le forum Non Elucidé j’en arrive exactement aux memes conclusions.
    Entre plusieurs hypothèses à savoir:
    -un copain ou un groupe de copains, en particulier ceux avec qui il avait passé la soirée.
    -un tueur en série qui a pu sévir à Pau dans les années 98
    -quelqu’un habitant l’immeuble où il avait promis d’etre à 23 h
    -un marginal ou un détraqué ou un ivrogne qui passait par là
    j’opte plutôt pour quelqu’un habitant l’immeuble. Pourquoi? question d’horaire et question géographique

    Blixen3

  3. Welt >> Merci pour ce complément d’information concernant le vélo.

    Blixen3 >> Hypothèse des copains : impossible, car une voiture est nécessaire pour le crime.
    Tueur en série : très peu probable, compte tenu des divergences entre affaires et du M.O.
    Marginal : idem, le crime est bien trop mature pour que ce soit envisageable.
    Habitant de l’immeuble : bien trop voyant, et vu le temps écoulé, les flics l’auraient déjà trouvé. Mais à mon sens, le meurtrier est dans la proximité immédiate.

  4. […] je suis les pistes de mon premier article sur l’affaire, je suppose qu’A a été abordé par un agresseur qu’il connaissait pour l’avoir […]

  5. […] peux à nouveau revenir sur le profil criminel déjà ébauché, en particulier dans les articles numéro 1 et numéro 3 et partiellement le compléter ou le […]

  6. Bonjour, Votre analyse des faîts est bien réalisée.
    Cependant une question demeure, pourquoi les autorités n’utilisent elles pas la technologie « satellitaire » afin de vérifier aux soirs de la disparition de l’enfant, des mouvements suspects en lieu et place du site de la découverte macabre.
    Pour le reste, j’ose croire qu’un jour, le « monstre » soit démasqué et traduit en justice.
    F.

    • Par satellitaire, vous entendez les réseaux téléphoniques ?
      Non seulement il faudrait que l’agresseur ait un téléphone, mais il faudrait aussi passer au travers de centaines (milliers ?) de références téléphoniques, ce qui pose un problème de temps pour épurer ces données et surtout supposer que ces registres existent et soient conservés…

  7. Je pense que F. parlait des images satellites. Dans le cas d’Estelle Mouzin, les enquêteurs avaient demandé des images de la région, mais visiblement cela n’avait rien donné. Je ne sais pas par contre si ce sont des satellites civils ou militaires qui son sollicités.
    Welt

  8. J’ignorais s’agissant le cas d’Estelle Mouzin, mais la zone de recherche était en milieu urbain sans doute plus dense, ce qui expliquerait l’absence de pistes.
    En l’état, pour l’enquête de Pau, le secteur a visualiser, est une zone peu peuplée, suffisament à l’écart, un véhicule anormalement stationné à une heure indue de la nuit ou du petit matin, devrait pouvoir interpeller l’esprit des enquêteurs.
    Pour l’heure, je vous remercie tout deux ( Zegatt et Welt ) pour la diligence et la pertinence de vos réponses ainsi que des éléments fournis, dignes d’une véritable étude psychologique et matérielle de cette indicible énigme.
    Cordialement.
    F

    • Welt >> Merci pour la correction. J’ignorais qu’une telle méthode avait déjà été utilisée dans un cas de disparition.

      Fédor >> Erreur de ma part donc sur le terme de « satellitaire ». Mais quand vous parlez de « secteur », vous pensez au quel ? Le lieu de disparition ou la zone de largage ?
      Je suppose que de telles mesures reposent sur pas mal de hasard (pour l’alignement sattelitaire au moment adéquat), reviennent très cher, demandent pas mal de temps à être effectives et surtout doivent s’avérer difficile à exploiter. Mais je suis totalement incompétent pour en dire plus…

  9. Je pense à la zone de  » largage  » plus proprement dîte.
    Cependant, je suis surpris du nombre de véhicules stationnés en journée, le long de cette artère, prés du Gave ( vos clichés sont éloquents Zegatt ).

    L’immeuble d’habitation en face, les riverains même parcellaires se situant dans la proximité du lieu du macabre dépôt, et pourtant aucuns témoins ne se sont signalés depuis la découverte de ces derniers jours, je m’interroge.

    Pour finir, le profil du tueur que vous dressez est cohérent, mais il peut avoir été de passage dans la région, il peut avoir également eu vent de l’édification de la digue si c’est un ouvrier ou un manoeuvre , voir un conducteur de travaux.
    Quant à son âge je pencherais plus pour un homme ayant la cinquantaine, d’allure solide, célibataire, certes, solitaire mais parfaitement inséré socialement, un visage inquiètant malgré tout pour qui sait déceler l’aspect physionomique du vernis social ( le regard de cet individu doit être atypique , dérangeant même ).

    Ce ne sont que des impressions, mais mon métier m’a permis souvent de me fier à mon intinct naturel.

    F

    • Si j’ai vu juste quant à la zone de largage (ce qui reste à démontrer, mais vu les lieux de découvertes assez réduits, il me semble miser juste), il ne faut pas oublier qu’il y a un coin en contrebas (le lavoir) où il est parfaitement envisageable que personne n’ait rien vu – surtout si 200m plus loin les lieux sont fréquentés par nombre de sans abris et autres « marginaux », il est normal que peu de monde s’y intéresse…

      Après, pour revenir aux vues satellitaires, le problème est qu’on ignore quand a lieu le largage (aux dernières nouvelles, il y avait une semaine de marge)….

      Welt, moi-même et d’autres avons discuté du largage, il paraît peu probable que la personne ait été au courant de l’édification de la digue vue que celle-ci n’était pas indiquée et que le largage a eu lieu entre 3 et 10 jours avant tout travaux (d’où risque d’éparpillement renforcé).

      Pour l’idée de la cinquantaine, j’avais posé l’option au début, ce n’est plus mon avis à l’heure actuelle (plutôt 24-40 ans) car il y a contradiction : d’un côté un fantasme poussé, de l’autre une éxecution sans réelle « pratique » (démembrement sommaire, inexpérimenté, en contradiction avec l’idée de quelqu’un qui remue cette idée depuis des lustres et qui aurait pu pratiquer des antécédents – sur des animaux notamment).

      …et si je ne suis pas indiscret, votre métier c’est… ? (Si vous voulez répondre tout en restant anonyme, changez les données -nom/mail-, le message sera enregistré uniquement sur l’interface et pas sur le site en lui-même, je pourrai le voir et le supprimer sans publication. Si non, pas de problème.)

  10. […] pour cette raison que cette affaire m’intéresse en particulier (Cf les articles à partir du Profilage criminel N°2-1). Pour Tournon, une jeune fille, coupable connu et en cavale. La récente affaire du Chambon sur […]

  11. Bonsoir, pour moi il y a de nombreuses incohérences dans cet affaire. Notamment: « La disparition de A est signalée avec 24h de retard. » et « un garçon sans histoire »…

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